Le patrimoine immobilier des français en péril ?
La problématique des actifs immobiliers vieillissants et mal entretenues a fait couler beaucoup d’encre ces dernières années. Il n’existe pas une ville, où nous ne pouvons voir ce SOS lancinant, adressé aux autorités locales : « Habitat précaire, immobilier en danger ».
Parfois, les appréhensions des propriétaires et copropriétaires s’avèrent vraies, et des bâtiments entiers s’écroulent, comme ce fût le cas à Marseille par exemple, rue d’Aubagne, où deux immeubles se sont affaissés de façon spectaculaire.
En 2015, l’Observatoire Clameur présentait des informations intéressantes sur l’entretien des logements locatifs par leurs propriétaires. L’Observatoire avait fait le lien entre l’augmentation des loyers et la réévaluation de la qualité des biens. Aujourd’hui le constat est différent.
La fiscalité alourdie, l’encadrement des loyers, les tracasseries juridiques créant des obligations nouvelles, en affaiblissant la rentabilité du placement immobilier résidentiel, privant les propriétaires des marges de manœuvre nécessaire pour engager des travaux, malgré certaine incitation sur la transition énergétique par exemple. Bref, les décisions publiques sont fustigées.
Cette analyse est un peu restrictive… Le problème est plus compliqué.
La réalité d’abord de la valorisation d’un bien et du loyer exigible.
On maximise le rendement à court terme, et on n’anticipe pas qu’au fil du temps l’usure d’un actif immobilier, au gré de chaque période d’occupation locataire, augmente. On ne veille plus à procéder avec rigueur remise en état préventive ou projective. On ne ménage aucune épargne de précaution pour payer les travaux devenus nécessaires, et donc on ne les engage pas…
Les bailleurs qui autogèrent leurs actifs ne mesurent pas non plus que les augmentations de charges incessantes des quinze années passées, ont rendu les preneurs légitimement exigeants. Locataire est désormais un statut à part entière, et l’époque où les ménages avaient pour seul réflexe de ne rien demander est révolue depuis longtemps. En outre, dans nombre de villes, notamment moyennes, l’offre existante est en concurrence avec l’offre locative neuve : cette offre fixe en quelque sorte le niveau attendu des prestations pour les locataires, et conforte leurs exigences.
Les propriétaires qui gèrent sans conseils professionnels ne savent pas toujours optimiser leur fiscalité.
Quoi qu’on en dise, le régime du déficit foncier est très favorable et cependant souvent utiliser que par les investisseurs professionnels qui dépensent pour entretenir leur logement (les factures de travaux étant déductibles des revenus fonciers imposable, ainsi que les déficits fonciers, déductibles du revenu global dans la limite de 10 700 € et reportables sur les exercices suivants). Au demeurant, les travaux peuvent donner lieu à emprunt, ce qui est même fiscalement souhaitable.
Enfin, les honoraires des gestionnaires de biens, agents immobiliers ou outils de gestion dématérialisés sont également déductibles. En clair, tout se passe comme si les propriétaires bailleurs préféraient payer de l’impôt plutôt qu’entretenir leur logement, ou encore en déléguer la gestion à un professionnel qui aurait le réflexe de le faire entretenir.
Sans conteste, l’état technique global du parc locatif privé français est insatisfaisant et les conséquences en sont parfois lourdes, pour les locataires comme pour les propriétaires. Pour les premiers, le sentiment d’un mauvais rapport qualité-prix, et parfois de risques vitaux. Pour les seconds, la vétusté, notamment par rapport aux standards du développement durable (loi sur la transition énergétique des bâtiments), renforce la difficulté de louer et donc le risque de vacance, mais donne aussi aux preneurs au logement de mauvais reflexes : un actif dégradé n’est pas respecté par ses occupants. Ainsi, le risque d’impayé y est accentué, comme celui de du turn over si se présente une opportunité de logement mieux entretenu.